Les institutions muséales, émetteurs légitimes de NFT
2021 aura été l’année de l’avènement des NFTs, ces jetons cryptographiques non fongibles qui permettent de créer des titres de propriété numériques, inscrits sur une chaîne de blocs et liés à un ou plusieurs fichiers. Les œuvres sont logées dans ces fichiers, hébergés de manière permanente.
Il apparaît d’emblée que les œuvres d’art numériques constituent le médium le plus « naturel » auquel associer un NFT, comme en témoigne les prix et les volumes records des ventes des « nouveaux artistes numériques » surgis en 2021.
Mais toute œuvre d’art physique peut être dupliquée numériquement. Les chefs d’œuvre des musées, photographiées infiniment par les visiteurs, sont ainsi répliqués en milliers, voire millions d’images, autant de copies à usage privé stockées sur les téléphones mobiles et les ordinateurs personnels.
L’enjeu des NFT est de singulariser une seule reproduction numérique parmi cette masse, en la désignant comme « copie numérique authentique ». C’est donc l’émetteur du NFT qui, pour l’essentiel détermine sa valeur intrinsèque. Suivant ce principe, chaque image numérique numériques jumelles des sept tableaux du Musée de l’Hermitage vendus à l’été 2021 portait la signature du directeur du musée.
Les institutions muséales sont donc les émetteurs les plus légitimes pour émettre des NFT de copies numériques de chefs d’œuvre. Elles constituent à la fois des marques reconnues par le public, des lieux d’exposition et de conservation et des centres de recherche scientifiques. Par-delà la simple duplication de leurs collections, les musées ont aussi les ressources nécessaires pour proposer des fichiers complémentaires des copies numériques, permettant d’enrichir à la fois l’authentification et la proposition de valeur : certificat, image radiographique, article scientifique, esquisses…
Des véritables stratégies de déclinaisons des « jumeaux numériques » sont à inventer, pour maximiser la valeur de la numérisation NFT des collections muséales, inspirées des dispositifs existant de valorisation par la copie imprimée : nous verrons bientôt fleurir les NFT « cartes postales », les NFT « multiples » et les NFT « copies », le numérique permettant une exploitation illimitée et facilitée par les faibles coûts de production.
